L’écoanxiété

 

Terme à la mode, l’éco-anxiété a longtemps été un concept fourre-tout. Les recherches permettent d’aller au-delà d’un sentiment de mal-être largement diffusé par les réseaux sociaux pour définir (voire créer) des termes adaptés et quantifier l’ampleur et la nature du phénomène.

Les conséquences sur la santé mentale sont considérables. 2,5 millions de français seraient concernés, ce qui en fait un véritable enjeu de santé publique. Le préjudice convoque aussi bien le droit du travail que le droit pénal et le droit de la responsabilité civile.

L’éco-anxiété n’est pas uniquement un problème mais aussi un moteur de changement. Ce sentiment conduit les gens à adhérer à certaines valeurs, à un engagement intérieur. Quels sont les ressorts d’un engagement contre le dérèglement climatique ? L’éco-anxiété des jeunes est-elle un facteur de mobilisation ou au contraire de paralysie ?

 

L’éco-anxiété et la jeunesse

 

Les études sur le sujet tendent à prouver que l’éco-anxiété est plus manifeste chez les jeunes. Les jeunes de tous horizons font face à une équation difficile : travailler à préparer leur avenir personnel au sein d’une société qu’ils perçoivent comme dysfonctionnelle, puisqu’elle ne semble pas avoir pris pleinement conscience de l’urgence climatique.

Une étude publiée sur The Lancet Planetary Health a été réalisée entre mai et juin 2021 dans 10 pays et auprès de 10 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans. 59% des sondés se disaient très ou extrêmement inquiets du changement climatique. 45% affirmaient que l’anxiété climatique affectait leur quotidien, sommeil, alimentation, travail et divertissements. 56% estimaient que ’humanité était condamnée. 55% pensaient qu’ils auraient moins d’opportunités que leurs parents 52% supposaient que la sécurité de leur famille serait menacée. 39% hésitaient à avoir des enfants.

 

L’éco-anxiété et les étudiants

En France, la cérémonie de remise des diplômes à AgroParisTech début mai 2022 a fait date. « Nous sommes plusieurs à ne pas vouloir faire mine d’être fiers et méritants d’obtenir ce diplôme à l’issue d’une formation qui pousse globalement à participer aux ravages sociaux et écologiques » ont exprimé plusieurs jeunes diplômés.

Le Shift project étudie plus particulièrement le lien entre l’enseignement supérieur et l’engagement pour le climat. Selon des données recueillies en mars 2019 la demande des étudiants est forte mais l’offre de formation aux enjeux environnementaux encore marginale (26% de cours obligatoires dans les écoles d’ingénieurs, 7% dans les universités)

 

Le choix des études

 

Sur quoi se fonde aujourd’hui le choix des études ? Sur les débouchés possibles à l’heure où le taux de chômage est encore élevé ? Sur des valeurs personnelles, familiales ? Quelle est la part de l’idéalisme… celle du réalisme dans ces choix ? Les buts attribués au choix des études universitaires permettent d’établir des typologies de motivations qui dessinent des profils très diversifiés d’étudiant-e-s : par intérêt, par défaut, pour réaliser un rêve, pour le statut social, pour l’épanouissement…

En France, le choix des études passe par un protocole spécifique Parcoursup, une procédure obligatoire d’orientation dans l’enseignement supérieur après le baccalauréat. Le choix se fait à travers différentes étapes souvent stressantes. Des milliers de candidats sont sur liste d’attente, taraudés par les questions : « Y a-t-il une place pour moi ? », « Quelle est ma place ? »

Les salons de l’enseignement supérieur constituent un vecteur important d’informations et de conseils concernant l’offre de formations post-bac. Trois chercheuses ont mis en avant le fait que ces salons restent une « fabrique du rêve ». Ce sont des dispositifs qui à travers des techniques d’enchantement proposent aux jeunes un faire-valoir narcissique. Il y a donc ce que le jeune peut choisir, ce qu’il croit vouloir et la réalité des études auxquelles il va être confronté !

La corrélation entre le choix des études et l’éco-anxiété doit tenir compte de ce contexte. Ce choix s’inscrit dans un processus anxiogène, la réalité socio-professionnelle du milieu familial y joue un rôle de premier plan et il n’échappe pas à la logique d’une société de l’image et de la consommation où l’étudiant est un produit à séduire.

Et pourtant, aujourd’hui où tant d’adultes trouvent leur travail inutile voire nocif pour l’environnement, ne convient-il pas de respecter ce sentiment d’écoanxiété et d’encourager les jeunes à choisir des métiers qui sont porteurs de sens et qui contribuent à la protection de la planète ?